samedi, octobre 25, 2008

HARRY HOUDINI (1874-1926) ET LE SPIRITUALISME - 5

L’étrange amitié

Houdini et Sir Arthur Conan Doyle se rencontrent en 1920, durant une tournée du magicien en Angleterre. Le deuxième avait écrit au premier pour obtenir des informations sur les frères Davenport. Houdini les lui fournit avec plaisir, assurant sans vantardise que personne au monde ne connaît le sujet mieux que lui. Leur amitié sera intense, houleuse et durera jusqu’à leur rupture en 1924, lors de la publication par Houdini de A Magician among the Spirits. Elle sera aussi suivie de près par le grand public, Doyle et Houdini comptant alors parmi les personnalités les plus célèbres du monde entier.

Le créateur de Sherlock Holmes avait tôt perdu la foi dans laquelle il avait été élevé dans sa jeunesse. Il avait ensuite participé à des séances de spiritisme, mais sans être convaincu. Sa conversion date de 1916, alors qu’il reçoit d’un médium un message de son beau-frère qui le convainc. Doyle était alors un homme très fragile et gravement frappé par l’adversité. Sa première épouse était décédée quelques années plus tôt; son fils était mort en 1916, de blessures subies lors de la bataille de Somme; son beau-frère était mort à la Guerre; et sa mère venait de décéder. «Converti» à cette foi qui remplaçait celle de son enfance, il allait devenir le plus ardent défenseur du spiritualisme.

Sa crédulité, pourtant, reste confondante. Il était par exemple convaincu que Houdini lui-même était doté de pouvoirs paranormaux, qu’il utilisait pour réaliser ses tours mais refusait de l’admettre publiquement ! Pire : lors de ce qui est un des plus désolants épisodes de sa vie, en 1920, il sera convaincu que des photographies de fées prises en 1917 par deux jeunes filles, Elsie Wright et sa cousine Frances Griffiths, sont authentiques. Il écrira même un livre en 1922 pour le proclamer (The Coming of the Fairies). Les jeunes filles avoueront après la mort de Doyle ce que tout le monde savait : elles avaient découpé dans un livre des images de fées et truqué les photos.

Sa deuxième épouse, Jean Doyle, pratiquait l’écriture automatique et les Houdinis étant venus les visiter à Atlantic City, celle-ci donna le 17 juin 1922 une séance à Houdini durant laquelle la mère du magicien s’adressa à son fils. Moment intense et troublant pour lui. Mais, à tête reposée, Houdini trouva des raisons de refuser d’accorder que sa mère s’était adressée à lui: le message, d’abord, s’ouvrait sur le tracé d’une croix, ce qui est improbable pour une épouse de rabbin; il était en outre rédigé en anglais, langue que sa mère ne parlait pas («Elle l’a appris dans l’au-delà», dira Dolyle, jamais déconcerté ou à court d’hypothèses Ad Hoc); la séance avait eu lieu le jour de son anniversaire et elle n’en faisait pas mention; ajoutez à cela que les tournures de phrases n’étaient pas celles de sa mère, mais celles de Jean et l’on comprend la conclusion à laquelle arriva Houdini, conclusion qu’il ne cachera pas. Cela fut le début de la désintégration de son amitié avec Doye.

Houdini avait pourtant tenté de convaincre Doyle que des moyens ordinaires permettaient de produire les phénomènes extraordinaires produits par les médiums. En voici un exemple, authentique.



Houdini montre à Doyle et à ses amis un tableau d’ardoise ordinaire, qu’il les laisse examiner à leur guise. Aux deux coins supérieurs du tableau, des trous ont été percés par lesquels de longues cordes sont insérées et nouées. À l’autre extrémité de ces cordes se trouvent des cochets. Houdini montre également aux participants quatre petites billes de liège, une bouteille d’encre blanche, ainsi qu’une cuillère. Il demande ensuite à Doyle de suspendre le tableau à l’aide des cordes et des crochets, n’importe où dans la pièce, de sorte qu’il soit bien en vue de tous. Ceci fait, il l’invite à examiner les billes de liège et, afin de s’assurer qu’elles ne sont pas truquées, d’en choisir une et de la couper en deux à l’aide de son propre couteau. Ce qui est fait. Doyle choisit ensuite une autre bille qui est déposée avec la cuillère dans la bouteille d’encre où on l’imbibe en la retournant avant de l’y laisser. À ce moment, Houdini invite Doyle à sortir de la salle, à marcher dans la direction de son choix et aussi loin qu’il le souhaite et d’écrire sur un papier qu’il lui remet et à l’aide de son propre stylo, les mots qu’il voudra. Puis de revenir dans la salle avec ce papier dans sa poche.

Lorsque cela fut fait, Houdini invite Doyle à sortir à l’aide de la cuillère la bille de liège de l’encrier puis de la faire toucher le côté gauche du tableau et de la lâcher. Ce qui se produit alors semble absolument inconcevable. La bille semble d’abord attirée par le tableau et s’y fixe, toute seule. Puis elle se met à bouger tout doucement, toujours toute seule, laissant une trace blanche qui compose des lettres. Quand elle s’immobilise, on peut lire : « Mene, mene, tekel upharsin », qui sont, très précisément, les mots qu’avait écrits Conan Doyle!

La solution de ce mystère a été révélée des années plus tard par un biographe de Houdini . Doyle, qui a souvent raconté l’histoire, a oublié un petit détail, qui lui paraissait sans doute insignifiant : à son retour, Houdini lui a demandé de voir le papier, pour s’assurer qu’il était bien plié. Il ne l’a pas ouvert, bien entendu. Mais il lui a substitué un autre papier plié, vide, qu’il a rendu à Doyle. Il a ensuite lu le message et durant la conversation qu’il a eue avec ses spectateurs et le discours qu’il a tenu devant eux il l’a, par le biais d’un code secret, révélé à un complice. Ce complice, par une ouverture secrète dans un mur et d’un angle où son geste était invisible, a pu faire passer une baguette extensible contenant un aimant qui a rejoint l’arrière du tableau. La bille de liège choisie par Doyle avait fait l’objet d’une substitution et celle qui était dans l’encre avait un centre de métal.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

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